MAXIMILIENNES (1999)

« Back to works

série: Les MAXIMILIENNES ( Blanches et Noires) (1999)

Je ressens le processus de la création comme le déroulé de trois étapes successives que l’on peut nommer ainsi : Désir, Outil, Traduction.
Le Désir est une  » petite sensation « , c’est un pressentiment de beauté à venir, un manque à combler, un rendez-vous avec le possible.
L’Outil, est le passeur entre l’idée éthérée et la matière grave (de gravitation) qui lui donnera forme. Il trace le geste de l’artiste, il fait venir, il ne sait rien mais concrétise tout. On peut définir un outil maîtrisé comme étant un arrangement de mécanismes (hardware en anglais est parfait), qui a la particularité de produire exactement le même effet ( la même trace ), si le geste qui le guide est exactement le même. Hors de cela, ce n’est pas un outil mais un dé du diable !
Enfin, la Traduction, le plus terrible, est ce conflit qui s’installe immanquablement entre l’image qui vient et l’idée mentale que se faisait l’auteur de l’oeuvre à naître. Que de déceptions souvent, de compromis toujours, de miracles rarement. Il n’est pas évident de voir apparaître ce que l’on n’attendait pas ! Certains savent s’en contenter, d’autres s’en arrachent les cheveux.

Les  » Maximiliennes  » sont le fruit d’un Désir provoqué par ma rencontre fortuite avec une pathétique photographie du XIXe siècle de François Aubert, représentant, clouée sur une porte, la chemise de l’empereur Maximilien d’Autriche, fusillé par des révolutionnaires au Mexique. Une petite bombe-image, glaçante d’hyper réalité, où un simple tissu porte toute la meurtrissure d’un suaire.
Mon Outil fut cette grosse chambre noire déjà utilisée pour les  » Gémelles  » de façon à photographier en monotype directe ( voir lexicon ) et à leur échelle, de vieilles chemises que j’avais  faussement  » fusillées » . Je disposais mes chemises de lin écru sur un fond soit noir, soit de planches de bois, afin d’obtenir au final une image négative de chemise grise sur fond blanc ou sur grisaille des planches.
La Traduction fut longue et pénible : je peinais à signifier une tension, une charge émotive avec mes chemises somme toute bien ordinaires. Évidemment, j’ai triché avec la vérité d’un événement tragique, je mesure la fausseté de mes fusillades et le fantôme de Maximilien serait bien justifié de venir me botter les fesses !
Je réalise aujourd’hui que je tentais tout simplement l’impossible : faire croire qu’une icône photographique puisse devenir une Icône.

10 éléments 100 x 80 cm. Monotypes directes négatifs. Épreuves au chlorobromure d’argent. Marouflés sur aluminium.

I feel the process of creation as the unfolding of three successive steps that one might call: Desire, Tool, Translation.
Desire is a « small sensation ». It is a premonition of the beauty that is to come, a need to be fulfilled, a rendezvous with things possible.

Tool is the ferry that takes you from the ethereal idea to the weighty matter and gives it form. It traces the artist’s movement and makes things happen, knowing nothing but realising all. once mastered, a tool could be defined as an combination of mechanisms (the word hardware is perfect here) with the peculiarity of producing exactly the same effect, the same trace, if the gesture that guides it is the same. apart from that, it is  not a tool at all but the devil’s device!
The last step, Translation, is the hardest of all. It is the inevitable conflict between the final image and the embryonic idea that originally formed in the artist’s mind. There is often disappointment, always a compromise and rarely a miracle. It can be quite a surprise to see something appear which is not what you were expecting. Some people are willing to take what comes and be content with it, others tear their hair out!
Les Maximiliennes are the fruit of a desire triggered by my seeing, by some lucky chance, a photograph charged with pathos, taken by François Aubert in the 19th century. The photograph shows the shirt worn by Emperor Maximilian of Austria when he was shot dead by revolutionaries in Mexico. A shock image, chilling with its overwhelming reality, where a simple piece of material bears all the deadly stains of a shroud. My Tool was that large camera previously used for Les Gémelles in order to photograph directly (and on their actual scale, because I thought it imperative not to tamper with the breadth of their aura) some old shirts that I had artificially embellished with gunshot holes. I put the unbleached shirts on a dark background to obtain a final negative image of a grey shirt on a white background. direct photography yielded a unique image.
Translation was laborious: I struggled to give my somewhat ordinary shirts a sense of tension, an emotional charge. obviously, I had cheated by simulating a tragic event, I am aware of the falseness of my make-believe dramas and Maximilian would be quite right to kick my backside for it!
Today I realise that I was quite simply trying to do the impossible: to make people believe that a photographic icon can become an… Icon.

10 elements 100 x 80 cm. Direct negative monotypes. Silver chlorobromide prints.